Accord mets et vin dans un restaurant

Nous relatons dans ce billet un article du Professeur Fabrizio Bucella paru dans le magazine Liège au Fil du Rhône n°22

La minute scientifique du Professeur Fabrizio Bucella

Faut-il prendre l'accord mets et vin dans un restaurant ?

L'accord mets et vins d'un restaurant est souvent la pire des solutions pour le client. Une astuce est dévoilée pour le choix de la bouteille. Lorsqu’on propose l’option d’un « accord vins » dans un restaurant, s’allument les loupiotes prudence et méfiance dans ma petite tête. Plus souvent qu’à son tour, il m’est arrivé d’ingurgiter un vin d’origine non contrôlée ou un coteau inconnu dont vous me direz des nouvelles. Les vins étaient infâmes. Leur seul avantage manifeste fut d’annuler le risque du restaurateur. Pour le prix d’un seul accord « spécial vin », il remboursait tous les pots de la journée, sourire de la sommelière compris. Y avait-il un accord saisissant avec les mets servis ? Un moment magique qui aurait justifié l’option ? Rien de sensationnel, on confina parfois au désastre. Plutôt que de me faire tondre comme un mouton de Panurge, je préfère désormais sélectionner un flacon et en profiter tout au long du repas, quand bien même il ne ferait pas l’affaire sur l’ensemble des assiettes (c’est le type qui vient de commettre un livre-cours complet sur les accords mets et vins qui l’écrit, espérons que son éditrice passe au travers du billet).

En vérité, il y a une chose impressionnante : le peu de cas que fait le restaurateur des vins. En souhaitez-vous la liste ? Inutile de la chercher sur le menu. Si vous quêtez des informations orales, elles seront soit farfelues, soit lacunaires. Pourtant, qui commanderait un repas sans connaître les plats ? Que l’on accordât cette vigilance aux mets, la nierait-on aux vins ? Qu’on préférât la viande au poisson, qu’on privilégiât les vins du sud sur ceux du nord ? La seule manière de poser un choix éclairé est de connaître le contenu tant de l’assiette que du verre. Tous les goûts étant dans la nature, il est difficile de « faire confiance » et il y a une probabilité faible que les vôtres de goûts soient précisément ceux du restaurateur ou du sommelier. De Gustibus Non Est Disputandum.

Voici donc une proposition de manifeste pour l’internationale des grailleurs et picoleurs : tant que les restaurateurs s’échineront ne pas dévoiler par écrit la composition précise des accords mets et vins, nous considérerons qu’ils trafiquent un chat dans un sac (ou une poularde dans une vessie pour rendre hommage à la Mère Fillioux).

Il y a une seconde raison à refuser l’accord mets et vins, celle-ci est d’ordre quasiment esthétique. Lors d’un menu déroulant au sens de plusieurs plats défilants, si les vins changent à chaque instant, on risque de perdre la boussole et le nord. Entendez, sauf à être professionnel de la boustifaille, on est soumis à trop d’informations sensorielles. Il n’est plus possible de se concentrer sur toutes les subtilités du plat et du verre qui changent à chaque fois. Je préfère bloquer une information (ici le vin) et me concentrer sur le reste (ici les plats). Dans le cas contraire, on s'expose à ne plus se rappeler perceptivement ni ce qui a été mangé, ni ce qui a été bu, pensez donc aux accords entre les deux. Quand bien même on appliquât ces sages préceptes, on n’est jamais à l’abri d’une expérience malheureuse. Dans le restaurant LOI... bien connu de la ville de Beaune et qui n’a plus jamais revu la pointe de mes godillots, nous commandâmes le menu de dégustation et une bouteille. Le sommelier charge si bien le sourire et les verres, qu’avant la moitié du repas, ladite bouteille est terminée. Feignant l’étonnement, il interroge :

- La bouteille est vide, que souhaitez-vous faire maintenant ?

- On va continuer à la carafe d’eau.

Il n’a plus feint.

À Anvers, il m’est arrivé l’expérience inverse (tiens, c’est cocasse Anvers Inverse) me réconciliant par là avec le Nord et la mer. Le sommelier du TZI... avait bien cerné les zigotos ayant posé leurs postérieurs dans son bel établissement et leur après-midi. Professionnel jusqu’au bout des ongles, il réalisa des dosages de chimiste afin que la bouteille tînt tout le repas. Et nous partîmes bons derniers. Que ce saint homme soit loué à jamais.

Un conseil

Permettez-moi de terminer par un petit conseil : comment choisir la bouteille de vin ?

Privilégiez les appellations génériques de producteurs connus. Lorsque la carte du restaurant est bien faite, vous devriez dénicher des pépites sous l’appellation bourgogne par exemple. Ne redoutez pas de passer pour un grippe-sou, que du contraire. Dernièrement, j’ai dégusté un bourgogne blanc de Jean-Marc Roulot et un bourgogne rouge d’Arnaud Ente. Les deux trouvailles ont justifié à elles seules le déplacement !

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